La lettre des dissidents intellectuels iraniens :
"Son excellence, Monsieur François Hollande,
Le Président de la République française,
La semaine dernière, les pacifistes iraniens, tout comme tant d’autres à travers le monde, ont suivi avec enthousiasme les négociations à Genève concernant le nucléaire iranien. Il y avait beaucoup d’optimisme et d’espoir dans l’air. Après une décennie de « dialogue de sourds », il y avait, cette fois-ci, le sentiment, partagé par beaucoup, qu’on se dirigeait vers la fin des sanctions imposées à l’Iran, vers le constat que le programme nucléaire iranien visait les objectifs civils. Plus important encore, tout le monde espérait que les représentants des six grandes nations faisaient de leur mieux pour empêcher l’irruption de la guerre dans la région.
C’est dire à quel point nous avons été surpris par l’attitude de votre gouvernement, bloquant de fait l’espoir d’un accord gagnant-gagnant.
Cher Monsieur le Président,
Les préoccupations concernant le programme nucléaire iranien sont, à l’évidence, les mêmes dans la communauté internationale. En toute logique, celles des peuples français, allemand et anglais ne devraient pas être différentes, voire contradictoires. Par conséquent, compte tenu du fait que les garanties acceptées par l’Iran donnent satisfaction aux cinq autres grandes nations, votre opposition nous interroge : s’agit-il des enjeux qui nous échappent et/ou des pressions venant des forces qui, dans la région, profitent des tensions entre l’Iran et l’Occident ?
Nous, signataires de cette adresse – victimes de la répression en Iran et appartenant aux différentes tendances politiques –, sommes persuadés que le nouveau président iranien [Hassan Rohani] cherche l’ouverture. Nous estimons que les grandes puissances, parmi lesquelles la France, devraient y répondre positivement. Une approche négative ne peut profiter qu’aux extrêmes en Iran et dans le reste du Moyen-Orient, région ô combien tourmentée.
L’image de la France et de l’Allemagne dans la mémoire collective iranienne a été différente de celle de leurs alliés occidentaux. Nous ne souhaitons pas que cette image positive soit déformée à cause du blocage de la solution diplomatique par votre gouvernement.
Nous espérons que vous êtes, comme nous, attaché à la réussite de ces négociations. Nous sommes persuadés qu’un accord entre les 5+1 et l’Iran élimine le risque d’une nouvelle guerre dans la région et diminue la menace du fondamentalisme au Moyen-Orient.
Nous nous permettons de nous adresser à vous afin de vous demander, ainsi qu’à votre gouvernement, d’assumer un rôle constructif dans ces négociations en adoptant une approche compatible avec celle des autres parties prenantes et contribuer ainsi à la réussite de celles-ci.
Comptant énormément sur votre compréhension, veuillez agréer, Monsieur le Président de la République, nos sentiments les meilleurs."
source: LeMonde.fr